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Fiches pratiques - Leucémies aiguës de l’adulte

Une leucémie aiguë est un cancer qui se développe à partir des cellules souches hématopoïétiques*, précurseurs des cellules du sang (globules rouges qui transportent l’oxygène, globules blancs* qui assurent la défense de l’organisme contre les infections, plaquettes qui stoppent les saignements).

En temps normal, ces cellules se développent et se spécialisent essentiellement dans la moelle osseuse* avant d’être libérées dans le sang. En cas de leucémie aiguë, elles restent immatures et se multiplient de façon anarchique. Ces cellules cancéreuses, appelées blastes*, ne remplissent plus leur fonction habituelle. Elles envahissent la moelle osseuse, l’empêchant de fabriquer les cellules du sang normales. Elles ont tendance à passer dans le sang.

Dans la très grande majorité des cas, ce sont les précurseurs des globules blancs qui sont touchés. Selon le type de cellules souches impliquées, on distingue :

  • les leucémies aiguës myéloïdes (LAM), suite à une atteinte des cellules souches précurseurs des polynucléaires et des monocytes (deux types de globules blancs);
  • les leucémies aiguës lymphoblastiques (LAL), suite à une atteinte des cellules souches précurseurs des lymphocytes (un troisième type de globules blancs).

De cause le plus souvent inconnue, une leucémie aiguë peut être favorisée dans certains cas par une exposition à des rayonnements ionisants, à des produits chimiques dans un contexte professionnel, par des antécédents de chimiothérapie, par certaines anomalies génétiques ou encore par des antécédents de maladie du sang.

Avec plus de 3 700 nouveaux cas estimés en France en 2011, la leucémie aiguë représente 1 % de l’ensemble des cancers. La LAL touche plus souvent les enfants et la LAM plus souvent les adultes. Seule la prise en charge des leucémies aiguës de l’adulte est décrite dans ce guide.

 

1. Le diagnostic et le choix de votre traitement

Comment est fait le diagnostic ?

Il n’existe pas de symptômes spécifiques. C’est l’hémogramme* obtenu par prise de sang qui permet d’évoquer le diagnostic.

Celui-ci est confirmé par les résultats d’un myélogramme* effectué dès l’admission en milieu hospitalier. Cet examen permet d’identifier le type de leucémie aiguë (myéloïde ou lymphoblastique).

D’autres examens du sang et de la moelle osseuse (immunophénotypage*, biologie moléculaire, caryotype*…) permettent notamment de caractériser précisément la leucémie et d’orienter le choix des traitements. Ce choix dépend aussi de votre âge, de votre état général et d’éventuelles contre-indications aux traitements.

 

Comment est fait le choix de votre traitement ?

Un traitement est souvent mis en route dès l’admission en milieu hospitalier spécialisé. Dans un second temps, une équipe se réunit lors d’une réunion de concertation pluridisciplinaire* (RCP). Elle propose la suite du traitement en tenant compte de l’ensemble des résultats des examens. Cette proposition est élaborée si possible en lien avec votre médecin traitant, elle tient compte de votre situation et s’appuie sur des référentiels de bonne pratique*. Il est souvent proposé de participer à un essai clinique*.

La proposition de traitement vous est ensuite expliquée par le médecin de l’équipe qui vous soigne pour votre leucémie. Elle doit tenir compte de votre avis et faire l’objet de votre accord.

Un programme personnalisé de soins* (PPS) vous est alors remis, ainsi qu’à votre médecin traitant.

 

Quels sont les professionnels de santé qui interviennent ?

Vous êtes soigné dans un service d’hématologie au sein d’un établissement autorisé à pratiquer la chimiothérapie.

L’équipe spécialisée qui vous entoure travaille en lien avec votre médecin traitant (un médecin généraliste le plus souvent). Elle rassemble toutes les compétences nécessaires : hématologue*, biologiste, oncologue médical*, infirmier, psychologue, assistante sociale, etc.

 

Leucémie d’origine professionnelle

Si une exposition professionnelle est présumée, le médecin qui pose le diagnostic doit rédiger un certificat médical initial. Il sera joint au formulaire de déclaration de maladie professionnelle* qu’il vous revient de compléter. Ces éléments sont à adresser à votre caisse d’assurance maladie. La reconnaissance en maladie professionnelle ouvre des droits spécifiques.

 

2. Les traitements d’une leucémie aiguë

À quoi servent les traitements proposés ?

Selon les cas, les traitements proposés ont pour but :
– d’obtenir une rémission complète* ;
– de la prolonger le plus possible et de guérir de la maladie en cherchant à détruire progressivement la totalité des cellules cancéreuses ;
– de contenir l’évolution de la maladie si elle ne peut pas être éliminée. Dans tous les cas, ils ont aussi pour but de traiter les symptômes, afin de vous assurer la meilleure qualité de vie possible.

 

Quels sont les traitements disponibles ?

La leucémie aiguë est traitée le plus souvent par une série de cures de chimiothérapie intensive. Les médicaments sont administrés par voie intraveineuse, ce qui implique la pose d’une voie veineuse centrale*.

Le traitement comporte en général deux ou trois phases :

  • le traitement d’induction a pour objectif d’obtenir la rémission complète. Il est réalisé au cours d’une hospitalisation d’une durée de 1 mois minimum. Il entraîne une période d’aplasie* (4 à 6 semaines) qui peut nécessiter la prise d’antibiotiques et des transfusions de plaquettes et de globules rouges. La réalisation de myélogrammes permet de vérifier la régénération des cellules du sang et la disparition des cellules cancéreuses ;
  • le traitement de consolidation et éventuellement d’entretien consiste en plusieurs cures de chimiothérapie qui peuvent selon les cas nécessiter une ré-hospitalisation ou se dérouler en ambulatoire. Ces traitements ont pour objectif de prévenir une rechute.

La chimiothérapie entraîne des effets indésirables* qui diffèrent en fonction des médicaments. Outre les effets sur les cellules du sang (globules rouges, globules blancs et plaquettes), il peut s’agir de nausées, vomissements, diarrhées, chute transitoire des cheveux, mucite*… Ils sont expliqués, prévenus et traités par l’équipe spécialisée. Une fois rentré chez vous, n’hésitez pas à solliciter si besoin votre médecin traitant.

Dans certains cas liés aux caractéristiques de la maladie, une greffe de moelle osseuse peut être envisagée. Elle est réalisée par injection intraveineuse de cellules souches hématopoïétiques* provenant le plus souvent d’un donneur.

 

Les soins de support

Des soins et soutiens complémentaires pour vous et votre entourage peuvent être mis en œuvre pour faire face aux éventuelles conséquences de la maladie et de ses traitements : fatigue, anxiété, dépression, problèmes sociaux, etc.

Ces soins, appelés soins de support, sont assurés par différents professionnels : psychologue, assistant social, etc. Ils exercent, selon les cas, au sein d’un établissement de santé (hôpital, clinique), à domicile, en consultation de ville, dans le cadre d’un réseau de santé, d’une structure de soins palliatifs*, d’une association de patients, etc.

 

3. Le suivi après les traitements

Pourquoi un suivi ?

Un suivi vous est proposé pour :
– vous accompagner afin de vous aider à maintenir ou retrouver si besoin un équilibre psychologique, relationnel et professionnel ;
– détecter et prendre en charge des effets indésirables tardifs des traitements ;
– détecter et prendre en charge une éventuelle rechute.

 

En quoi consiste le suivi ?

Le suivi peut être assuré par votre médecin traitant en alternance avec l’équipe spécialisée en charge des traitements durant les 5 premières années ; puis par votre médecin traitant seul.

Il repose sur la réalisation régulière d’un examen clinique* et d’un hémogramme* éventuellement complété par un myélogramme* en cas d’anomalie de ce dernier. Le rythme de ces examens est adapté à votre situation et défini en accord avec vous.

Votre médecin vous indique également les signes qui doivent vous amener à consulter en dehors des rendez-vous programmés, notamment : perte de poids inexpliquée, sueurs nocturnes, fatigue significative, essoufflement, fièvre persistante, infection, saignements, hématomes spontanés…

Le suivi de la maladie s’inscrit par ailleurs dans un suivi médical global incluant les recommandations habituelles de dépistage qui s’appliquent comme dans la population générale :
– mammographie tous les 2 ans pour les femmes âgées de 50 à 74 ans (dépistage du cancer du sein) ;
– test de recherche de sang dans les selles tous les 2 ans pour les hommes et les femmes âgés de 50 à 74 ans (dépistage du cancer colorectal).

 

4. Glossaire

  • Aplasie : très forte diminution de la production par la moelle osseuse des cellules du sang (globules blancs*, globules rouges, plaquettes). C’est un effet indésirable temporaire de certains médicaments de chimiothérapie.
  • Blaste : cellule de la moelle osseuse*très immature. Terme couramment employé pour désigner les cellules leucémiques.
  • Caryotype : examen pratiqué sur les cellules du sang ou de la moelle osseuse* qui consiste à rechercher des anomalies génétiques dans le noyau des cellules.
  • Cellule souche hématopoïétique : cellule fabriquée par la moelle osseuse*, précurseur des cellules du sang (globules rouges, globules blancs et plaquettes).
  • Directive anticipée : instruction écrite donnée par avance par une personne pour le cas où elle serait dans l’incapacité d’exprimer sa volonté. Les directives anticipées permettent de prendre en considération ses désirs, en particulier sur la question de l’arrêt ou de la limitation d’un traitement. Il s’agit d’une disposition de la loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie.
  • Effet indésirable : conséquence gênante et souvent prévisible d’un traitement, survenant en plus de son effet souhaité. Les effets indésirables ne sont pas systématiques. Ils dépendent des traitements reçus, de leur association avec d’autres traitements, des doses administrées, du type de cancer et de la façon dont l’organisme de la personne malade réagit. On parle aussi d’effets secondaires.
  • Globule blanc : cellule qui combat les infections. Les globules blancs sont présents dans le sang et dans la lymphe. Il existe plusieurs sortes de globules blancs : les lymphocytes, les polynucléaires et les monocytes.
  • Hématologue : médecin spécialiste des maladies du sang, dont les leucémies.
  • Hémogramme : examen qui, à la suite d’une prise de sang, vise à compter et examiner les différentes cellules du sang (globules rouges, globules blancs, plaquettes, cellules immatures). On parle également de numération formule sanguine, abrégée en NFS ou NF.
  • Immunophénotypage : examen pratiqué sur les cellules du sang ou de la moelle osseuse* qui consiste à rechercher des anomalies des protéines présentes à la surface des globules blancs.
  • Lymphocyte : variété de globule blanc*.
  • Moelle osseuse : tissu contenu dans les os, qui fabrique les cellules souches hématopoïétiques*.
  • Mucite : inflammation des muqueuses de la bouche ou du système digestif, qui se manifeste par une rougeur, une douleur ou des aphtes plus ou moins nombreux qui peuvent gêner l’alimentation.
  • Myélogramme : examen au microscope des cellules d’un échantillon de moelle osseuse généralement obtenu par ponction au niveau du sternum ou du bassin. Cette ponction est réalisée sous anesthésie locale.
  • Oncologue médical : médecin spécialisé dans les traitements du cancer par des médicaments. On parle aussi de chimiothérapeute.
  • Palliatif : se dit d’un traitement dont l’objectif est d’atténuer la douleur ou de soulager les symptômes d’une maladie. Il vise à maintenir autant que possible la qualité de vie physique, psychologique et sociale d’une personne.
  • Rémission complète : disparition de toutes les cellules cancéreuses observables dans le sang et la moelle osseuse. Au-delà de 5 ans de rémission complète, on parle de guérison.
  • Réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) : réunion entre professionnels de santé au cours de laquelle le dossier de chaque patient est étudié en vue d’élaborer une proposition de traitement. Une réunion de concertation pluridisciplinaire rassemble au minimum trois médecins de spécialités différentes.
  • Voie veineuse centrale : tuyau souple et fin, appelé cathéter, inséré sous anesthésie locale dans une veine à la base du cou et ressortant au niveau de la clavicule. Il permet d’effectuer de façon répétée des injections ou des perfusions de médicaments directement dans le sang sans avoir à piquer les veines, ce qui évite de les abîmer. Il est laissé en place le temps du traitement.

 

HAS mars 2012, Guide usagers